Que pensent les Français de la pauvreté ?

Les Français perçoivent socialement la pauvreté selon trois caractéristiques clés qui traduisent une véritable crainte de « disqualification sociale ».

  • La pauvreté est d’abord perçue comme une chute qui peut arriver à n’importe quel moment de la vie.

La pauvreté a longtemps été perçue comme un état de misère stabilisé et hérité de génération en génération. Pendant les Trente Glorieuses, puisque beaucoup ont réussi à faire fortune et à changer de classe sociale, les pauvres étaient vus comme des inadaptés sociaux, incapables de saisir les opportunités qui leur étaient offertes.

Après la crise de 1973, cette conception a changée : elle est devenue un phénomène qui nous « tombe dessus » et engendre une dévalorisation sociale.  C’est la « nouvelle pauvreté ». Les chiffres montrent d’ailleurs cette évolution : en 1976, 31 % des gens estimaient que les pauvres de leur quartier/village avaient sombré subitement dans la pauvreté, un chiffre monté à 71 % en 1993 après la crise des années 1970 pour se stabiliser à 58 % en 2007.

  • Les Français montrent par ailleurs un certain pessimisme envers l’exclusion sociale. 

Cette notion a remplacé la pauvreté et traduit, en plus d’un manque matériel, l’isolement relationnel. En effet, 85 % des Français sont convaincus que la pauvreté est largement répandue en France, ce qui place le pays au 7ème rang dans l’Eurobaromètre mesurant l’avis des populations sur le sujet (alors qu’il est au 17ème rang en pauvreté monétaire relative[1]).

De plus, les Français sont fatalistes sur l’idée que l’exclusion sociale peut toucher n’importe qui : en 2006, 86 % partageaient cette croyance alors que la moyenne de l’Union Européenne était de 62 %.

  • Enfin, les Français montrent de plus en plus d’inquiétude quant à l’évolution de la pauvreté.

En 2013, 87 % d’entre eux estimaient que la pauvreté allait augmenter dans le futur, un chiffre qui s’est renforcé de 27 points en 10 ans.

La France se démarque toutefois par une forte compassion envers la pauvreté de la part de ses citoyens. Ainsi, en 2014, seuls 14 % des Français estimaient que la pauvreté était due à la fénéantise pour 21 % des Irlandais et 41 % des Portugais. Cependant, ce sentiment s’érode depuis quelques années : l’idée que des personnes vivent dans la pauvreté par manque de chance a baissé de 11 points en 10 ans (70 % en 2009 contre 59 % en 2020).

Break Poverty lutte contre la pauvreté, afin qu’un enfant pauvre ne devienne pas un adulte pauvre par le biais de programmes innovants visant à enrayer le déterminisme social dès le plus jeune âge.

[1] La pauvreté relative est calculée en comparaison du revenu médian d’une population d’un pays. Les personnes figurant sous ce seuil sont considérées comme pauvres dans un pays. Cela permet de comparer les inégalités sociales des pays développés. En France et en Europe, le seuil est le plus souvent fixé à 60 % du niveau de vie médian.

Sources:

  • Christophe Sanchez, « Le traitement des clients pauvres par les grandes entreprises en France », 2016
  • Baromètre d’opinion de la Drees, sur la santé, la protection sociale et les inégalités, 2013
  • Eurobaromètre, « Pauvreté-Exclusion », 2010
  • CREDOC , Conditions de vie et aspirations, 2020
  • INSEE, Pauvreté monétaire / Seuil de pauvreté, 2021
  • Enquête World Value Survey, 2007

Crédit photo: Tanya Gorelova/ Pexels